samedi 12 mai 2012

Première esquisse d'une mise au monde

En me laissant porter par les rues – le petit bonhomme blanc, on traverse, le petit bonhomme rouge, on tourne –, je me suis tout d'un coup retrouvé à un carrefour qui me disait vaguement quelque chose. J'ai levé les yeux et j'ai vu, là-haut, sur le toit d'un immeuble au milieu du bloc, un grand panneau publicitaire pour Matercell, la banque de cellules-souches dans les locaux de laquelle on avait eu nos quatre cours de préparation à l'accouchement avec Marcela, notre sage-femme officielle. On avait reçu beaucoup de jolis petits échantillons en tous genres, plusieurs propositions de concours histoire de récolter nos adresses et il nous avait même été proposé de donner un peu de ce bon sang du cordon ombilical de notre enfant, par charité, à ceux qui pourraient en avoir besoin. Mais non, merci, sans façon.

Après quelques carrefours à gauche et quelques carrefours à droite, j'ai vu dépasser l'enseigne du Jumbo de Villa Crespo: c'était là, juste à côté, que se retrouvaient tous les mardis soir l'équipe de Vendy, Fran et Natalia avec les parents qui avaient choisi d'accoucher à la maison. Beaucoup plus respectueux de la personne que ces cliniques privées où vous poussez comme vous pouvez pendant le temps qu'on vous laisse pour ça dans une chambre bleu clair – lino gris, vitre dépolie sur cour intérieure, néons en option – et où on vous ouvre le ventre pour un oui ou pour un non, ça c'est sûr, super sympa, des vrais potes, tendance bouddhistes et tout ce qu'on voudra, mais peut-être un tantinet baba, non? En Suisse, je dis pas, mais là...

Refaire, d'un bloc à l'autre, les premiers mois de cette Lucie qui s'appelait encore Crevette, ça m'a permis de voir un peu plus clair dans ce qui a conduit à cet accouchement que je ne sais pas encore très bien comment écrire, cet accouchement qui s'est passé de la meilleure manière possible étant donné qu'il s'est passé comme ça – d'accord, mais bon... –, cet accouchement pas exactement humanisé – de la sécurité, on en voulait, on en a eu! – qui nous reste encore pas mal en travers de la gorge et dont le récit détaillé – mais la mère et l'enfant vont bien, qu'est-ce qu'on veut de plus? – venait de faire grimper au mur mon cher Leveratto pendant pas loin d'une heure.