En écoutant Soledad de Piazzolla au bord de cette avenida de Mayo presque vide, en attendant le 86 dans ce petit matin de lundi de Pâques, j'ai repensé à ce moment au milieu du tour de Gustavo où j'ai senti que tout s'effondrait dans le moment. Je ne suis pas sûr de très bien comprendre ce que je veux dire par là, mais la phrase m'est venue comme ça et j'ai eu le sentiment, en l'écrivant sans tarder sur mon iPod, que je tenais un petit bout de la solution en quelques mots.
Pendant la nuit, j'avais beaucoup pensé à ce mail que Rabanal m'avait envoyé à quatre heures du mat – "pour ne pas laisser retomber l'enthousiasme" – le matin de Pâques après avoir refait le monde toute la soirée avec Jean-Paul Enthoven. Bien sûr, Rodolfo lui a parlé de ma traduction et le patron de Grasset, qui passait justement des vacances à Punta del Este avec sa douce et mignonne Argentine, lui a naturellement dit qu'il se ferait un plaisir de la lire – de la lire personnellement, m'a-t-il confirmé en réponse à mon mail que je lui ai envoyé séance tenante avec ma mon texte en pdf et en word, au cas où.
Je crois que ce moment de présence au milieu de la nuit s'appuyait aussi sur ces belles perspectives mais ne dépendait pas, contrairement à ce que j'ai eu longtemps tendance à croire, de leur réalisation. Ce qui comptait, c'était l'équilibre du moment trouvé grâce aux mantras, à ces publications qui se précisent, à ce retour en Suisse de plus en plus juste, à Lucie, à Celia, à tout ce dont je ne suis pas capable de me rendre compte.
Beaucoup de circonstances contribuaient à la qualité de ce moment, mais elles se dissolvaient en lui, perdaient corps, perdaient toute espèce d'importance, d'où, sans doute, maintenant que j'ai fait mon possible pour creuser un tout petit peu plus loin grâce aux mots, cette idée pour moi tout à fait positive d'effondrement.