lundi 30 novembre 2015

Au fond des odeurs de bois brûlé

Le moteur du chasse-neige et son gyrophare dans la nuit coupante.

La neige deux villages plus haut, les pentes luisent entre les forêts.


Une histoire prend racine au fond des odeurs de bois brûlé.

dimanche 29 novembre 2015

La vie se réchauffe de présent

Rassembler à travers la méditation les temps et les lieux pour ôter leur sens à la nostalgie et aux attentes.


Alors, spontanément, les temps et les lieux se mélangent, la vie se remplit, se réchauffe de présent.

samedi 28 novembre 2015

Dissoudre les questions

Une des manières de répondre aux questions que je me pose, c'est de les retirer, de les dissoudre.

vendredi 27 novembre 2015

Une femme, un monde

Une note, de 2011:

"Une femme est un autre monde. Il faut prendre le temps de le deviner, de le laisser se déplier à travers les détails minuscules des premières rencontres. Tout un monde qu'on a peur de découvrir vide ou, en tout cas, pas aussi plein de tout ce qu'on voudrait y trouver.


Ce monde qui est ce qui est, qui est surtout ce qu'on prend la peine d'y mettre. Parce qu'à la fin, bien sûr, on ne s'y découvre que soi-même, mais il faut du temps pour découvrir qu'on est soi-même en train de fabriquer ce qu'on croit découvrir, soi-même en train d'alimenter cet univers dont on croit qu'il s'offre à nous."

jeudi 26 novembre 2015

L'arbre à lolettes

– C’est que, vous comprenez, on a fait plus de deux cent cinquante kilomètres pour venir jusqu’ici...

– Oui, je vous entends, mais à ce que je sais, toutes les lolettes ont été enlevées pour l’hiver. Elles pourraient endommager l’arbre vous voyez. Il faut que je fasse un téléphone pour vérifier.

– Mais on peut les mettre et les enlever ensuite discrètement, c’est possible, non? C’est très important pour notre fille: ça fait déjà plusieurs jours qu’on la prépare à ce moment et c’est elle-même qui a décidé de laisser non pas une, mais toutes ses lolettes! Toutes! Vous imaginez? Elle les a même accrochées à des rubans roses et violets, parce qu’elle adore le rose et le violet!

– D’accord, mais vous savez qu’on ferme dans moins d’une demi-heure?

– Est-ce qu’on peut juste entrer dans le zoo pour voir cet arbre, laisser les lolettes, les reprendre et repartir?

– Tout ce que je peux vous proposer, c’est le demi-tarif: 13 francs par adulte. Ça ferait donc 26 pour les deux. Les enfants ne paient pas.

– Juste un petit saut, c’est pas possible?

– C’est 13 francs si un des adultes reste dehors. L’arbre se trouve ici, juste en face des toilettes.

– Bon bon, d’accord: deux adultes s'il vous plait. En route pour l’arbre à lolettes!

mercredi 25 novembre 2015

Pas plus loin

Je suis revenu dans le magma de mes habitudes pour pouvoir découvrir à nouveau, plus profondément, ce que j'avais compris, ce que je croyais acquis, ce sur quoi je pensais pouvoir m'appuyer - tout était si limpide! - pour aller plus loin.


Pas plus loin, donc, plus profond.

mardi 24 novembre 2015

Le nom des lieux

Écrire le nom des lieux me les rend plus exotiques que de les traverser.

lundi 23 novembre 2015

Le calme vivant et la non-existence

Ne pas confondre le calme vivant et la non-existence. Dans les deux cas, on ne souffre pas. 

dimanche 22 novembre 2015

L'espace ouvert et sombre

Grandeur des paysages en train de s’enneiger. De nouveau porté par cette envie d’écrire un roman pris dans l’hiver, dans l’espace ouvert et sombre qui palpite à un rythme très lent, souterrain.

samedi 21 novembre 2015

Une vérité qui tient par elle-même

Une note, de 2010:

"Écrire pour remplir des pages ne fait pas sens. Écrire pour m'aider à trouver et à sentir cette vérité, oui. J'ai déjà découvert qu'écrire pour être célèbre ne faisait pas sens. Oikawa, comme souvent, tourne la question dans l'autre sens: si la vérité est vraiment là, la célébrité viendra. Si c'est la célébrité qui est recherchée: il ne se passera rien. Je ne crois pas que cette vérité soit une vérité de l'aveu, parce que l'aveu – je repense au dernier exemple qui est le texte de Giulio – est avant tout un acte égocentrique, un acte qui est tourné vers soi dans le geste même de la révélation.

Cette vérité est une vérité de l'adéquation, une vérité de la phrase qui disparaît derrière ce qu'elle dit parce qu'il n'y aurait pas eu d'autre manière de le dire, parce qu'on ne se demande plus s'il y aurait eu une autre manière de le dire. C'est une vérité de l'évidence, une vérité qui prend la place de tout ce qui pourrait être dit parce qu'elle porte en elle la certitude que toute autre approche n'aurait pas été tout à fait aussi ajustée, pas tout à fait aussi adéquate, pas tout à fait aussi simple. C'est ce moment qui fait clic. Ce moment que je gagnais à la sueur de mon front et qui doit, qui va devenir une habitude, parce que la vérité dépend de la volonté et que je crois être rempli d'assez de volonté.

Cette volonté, je vais peut-être devoir l'éduquer, je vais peut-être devoir la convaincre, mais je crois que cette volonté est bel et bien là, je crois que je peux ne pas avoir de doute à son sujet, je crois que je peux faire confiance à cette volonté qui est en moi. L'aveu est une vérité socialement constituée, une vérité qui dépend de normes, qui dépend d'une époque, qui dépend d'un contexte. L'aveu, même s'il a l'air d'une vérité du coeur est avant tout une vérité de la tête, une vérité qui dépend des prétextes, une vérité qui tombe dès qu'on lui retire l'étai des lois.

La vérité que je cherche est une vérité qui tient par elle-même, parce qu'elle n'a pas d'autre source qu'elle-même, pas d'autre source que moi-même. Une vérité qui n'est pas déviée par ce que je sais, qui n'est pas déviée par ce que j'ai appris, une vérité qui peut jaillir hors de moi parce que je dispose de la technique des mots qui lui laisse libre cours, parce que je sais taper, parce que je sais laisser sortir les mots hors de moi, parce que j'apprends à ne pas donner d'autre forme aux mots que celle qu'ils se donnent eux-mêmes."

vendredi 20 novembre 2015

Tendu

Une note, de 2007:

"Tendu comme je ne l’ai pas été depuis longtemps. Le monde m’arrive comme à travers un voile qui serait accroché à mon plexus. Tout me semble un peu flou et ce qui dépasse le reste, les bruits surtout, me fait sursauter à l’intérieur, ce qui veut dire que tous mes organes sautent sans que mon expression change, sans que ma peau soit véritablement affectée.

Il y a aussi l’effort qu’il faut faire pour faire entrer un peu d’air au milieu de ce corps serré sur lui-même et cette impression d’être sale, très sale, de regorger de pellicules et que tous les gens autour de moi dans le métro, eux aussi, sont très sales, exhalent de petites puanteurs intimes, de vieux cols, de bouches et de cuirs chevelus.

Et mon visage un peu moins sensible, comme pendant une bonne cuite, une bonne journée de ski, mes mouvements mesurés et mes coups d’œil brefs, pour surveiller le monde, cette impression d’aller chez le dentiste – il s’agit d’un cours de tango –, mon désespoir quand la boulangère m’a dit qu’elle ne pouvait me rendre sur mon billet de deux pesos pour mes deux croissants et que j’ai été forcé de lui dire que je ne pouvais pas les lui acheter, alors, sans même me plaindre, sans même insister, sans même faire tout le petit cirque qu’un Argentin, à ma place, aurait fait."

jeudi 19 novembre 2015

La flèche vers le haut

– Pourquoi la flèche elle va en haut?

– Elle va pas en haut, elle va tout droit. Enfin, oui, elle va en haut, mais ça veut dire qu’elle va tout droit, parce que si elle allait tout droit, on ne la verrait pas. Tu comprends?

– Alors on peut y aller? C’est vert!

– Non, parce que nous, là, on veut aller à droite et la flèche qui montre à droite, de ce côté-là, eh ben elle est encore rouge.

– Alors, là, on peut y aller?

– Mais oui! On y va! J’aime beaucoup tes questions, petite Lucie, vraiment beaucoup!

mercredi 18 novembre 2015

Du moment où je l'écris

Une note, de 2010:

"L'important n'est pas l'inspiration, c'est d'être là. C'est aussi un exercice. 

Tout ce que j'écris ne peut venir que du moment où je l'écris.


Me répéter ça comme un mantra."

mardi 17 novembre 2015

Comme l'ombre de l'arbre

Une note, de 2014:

"Maman qui joue du violon pour se changer les idées, pour faire face à la mort, celle de Dellon et puis la sienne. Je me reconnais bien dans cette posture de petit soldat.

Hier, en la voyant traiter les rosiers au fond du jardin, je me suis dit que ça serait bien qu’elle meure d’une crise cardiaque au milieu de ses salades, pas qu’elle meure maintenant, mais qu’elle meure comme ça.

Ce temps qui passe, qui passe pour tous, comme l’averse, comme l’ombre de l’arbre."

lundi 16 novembre 2015

Souvenirs du Grenier

Une note, de 2007:

"L’autre jour, au bistrot, je suis revenu dans ma tête jusqu’à la soirée du Grenier. Je me suis forcé à ne pas écrire pour bien rester dans la sensation et j’ai commencé à avoir peur, physiquement.


Tous étaient là, le père et le substitut du père, les rôles et les importances mélangées. Et Paola dont je me rappelle quelques fragments, toujours les mêmes: très difficile d’en faire naître d’autres, même avec beaucoup d’efforts."

dimanche 15 novembre 2015

Me tenir tête à moi-même

Tenir tête à quelqu'un est finalement nettement plus constructif et confortable que de me tenir tête à moi-même.

Toujours déjà là

Le temps n'est pas celui qu'on croit. Le temps n'est jamais celui qu'on croit. Il n'est jamais passé, jamais à venir, toujours déjà là. 

vendredi 13 novembre 2015

Rien ne nait de rien

- Rien ne nait de rien et s'il nait de rien, c'est que ce rien est déjà quelque chose. 

jeudi 12 novembre 2015

Les sens et la mémoire

Les montagnes me montrent que je tends vers des moments où je tendais vers autre chose et que je suis frustré de ne pas retrouver ce moment. Mais c'est impossible parce que tout, presque tout était dans la tension vers.


Phrase de Proust sur la différence entre les sens et la mémoire. 

mercredi 11 novembre 2015

Dans le monde

C'est dans le monde qu'il faut faire ce qu'il y a à faire, pas à côté. 

mardi 10 novembre 2015

Quand je parle depuis lui

Une note, de 2010:

"Ce dont je parle n'a que peu d'importance, ce qui importe, c'est comment j'en parle, c'est depuis où.

C'est cet où que je cherche ici. Cet où dont j'ai une intuition très intermittente, mais qui me manque partout ailleurs. Cet endroit profond depuis où je prends la parole, cet endroit auquel je dois apprendre à faire véritablement confiance, cet endroit qui peut m'apprendre des choses, m'apprendre ce qui est vraiment important, si je sais lui faire entièrement confiance, si je sais écouter ce qu'il me dit quand je parle depuis lui.


Si je sais écouter ce qu'il me dit quand je parle depuis lui."

lundi 9 novembre 2015

Se sentir vivant en le faisant

– En fait, tu sais, j'ai l'impression que quand je suis arrivé, mon texte, c'était un gros menhir bien terminé qui ne me plaisait pas, que j'arrivais plus à bouger et dont je savais plus trop quoi faire... Marianne a sorti son marteau et son ciseau, elle en a fait plein de petits morceaux et elle m'a dit, avec beaucoup de tact: Vas-y, fais-en autre chose!

– Moi, ce que je trouve bien avec les éditeurs, c'est qu’ils se posent pas la question, eux, de savoir si c’est recevable ou pas: ils te font leurs critiques cash et c’est à toi d’encaisser et d’en faire quelque chose pour avancer même si tu t’en es pris plein la gueule.

– Bon, mais il faut pas oublier que c’est finalement juste des taches d’encre sur un peu de papier… L’important c’est de se sentir vivant en le faisant!

– Moi, je suis pas sûr de me sentir vivant en le faisant...

– Ah non? C’est vrai que quand on se prend des pains dans la gueule de la part des éditeurs, alors là oui, on se sent vachement vivant!

dimanche 8 novembre 2015

C'est à moi!

Quand je serai vraiment détaché de cette idée de propriété, je cesserai de rencontrer des gens qui me crient:


- C'est à moi! C'est à moi! C'est à moi!

Sans doute dans une autre vie.

samedi 7 novembre 2015

Me débarrasser des vieux trucs

Avouer quelque chose qui me fait honte, c'est comme me débarrasser de vieux trucs auxquels je tiens encore sans trop savoir pourquoi, des trucs auxquels j'invente des utilités de plus en plus éloignées et improbables: ça fait un bien très profond. 

vendredi 6 novembre 2015

Comme en équilibre

Une note, de 2010:

"Après, dans le nouveau café que j’avais envie d’essayer depuis un moment, El Tranvía, je crois, près de la gare de Primera Junta, j’ai vécu un moment très fort de connexion.

Je regardais devant moi, les yeux mi-clos, comme quand je médite, les deux mains posées sur mon carnet, et je sentais l’espace visuel et sonore se courber autour de moi, je sentais que tout ne gardait pas les mêmes distances, les distances que m’indiquent d’habitude mes sens.

Quand j’essayais d’écrire tout ça, il se passait aussi quelque chose d’étrange avec mon stylo qui ne sentait pas vraiment la résistance de la page, ma main qui ne sentait pas vraiment la résistance du stylo, mon autre main qui ne sentait pas vraiment la résistance de la table. L’ensemble du monde changeait d’aspect autour de moi, ma perception du monde autour de moi changeait.

Bien sûr, par moments, je me sentais pas très à l’aise, je sentais le besoin d’ouvrir les yeux, de noter quelque chose sur mon carnet, parce que je sentais qu’on me regardait, que je sentais que la jolie serveuse à la quarantaine bien ferme et à la tresse noire très serrée me regardait, alors je n’arrivais plus tout à fait à me laisser aller à ce que je sentais, alors j’écrivais un peu, en me disant que je pourrais rentrer et me branler en pensant à la jolie serveuse, mais que c’était justement un truc pour me faire sortir de cet état alors que non, on allait rester encore un moment et qu’on verrait bien ce qui se passerait.

Je suis resté et il ne s’est rien passé de plus. Je suis seulement resté encore un peu dans cet état, comme en équilibre, en équilibre au bord de je ne sais pas trop quoi – mais, maintenant aussi, j’ai les yeux mi-clos et la sensation des doigts sur le clavier n’est pas habituelle."

jeudi 5 novembre 2015

La pratique au quotidien

Une note, de 2013:


"En chantant à pleine voix le Shoshinge dans sa version brahmanique, je me dis que la pratique au temple est là pour soutenir la pratique au quotidien, pas pour la remplacer: celle qui compte, c'est quand même celle de tous les jours."

Il n'y en a pas une qui compte plus que l'autre.

mercredi 4 novembre 2015

I forgot to open the page

Ce soir, Piazzolla dans la voiture ne m'a presque rien fait. Pire, je sentais qu'il aurait pu me faire quelque chose, mais que non. Il y a juste ce moment où il dit I forgot to open the page avant de replonger dans le morceau qui m'a lancé des frissons dans le bas du dos.

mardi 3 novembre 2015

La moissonneuse étincelait

Tout d'un coup, juste avant l'arrêt du bus, la moissonneuse à côté de son tas de betteraves étincelait dans la dernière lumière du jour.

lundi 2 novembre 2015

Pendant que j'ai une forme humaine

Mon angoisse de gaspiller ma vie, de la laisser filer entre mes doigts. Avant, j'avais peur de ne pas arriver à créer une véritable œuvre d'art. Maintenant, j'ai peur de ne pas arriver à véritablement comprendre la Voie pendant que j'ai la chance d'avoir forme humaine.

dimanche 1 novembre 2015

Loi de l'attraction

Loi de l’attraction: ces derniers temps, je rencontre des femmes qui ont fait de beaux chemins spirituels, mais qui restent accrochées à des relicats d'égo qui nourrissent leurs peurs et les rendent agressives.

Qu'est-ce que ça peut dire exactement de moi et de là où j'en suis? Qu'est-ce que j'ai exactement à apprendre de ces rencontres?


M'inspirer de ce vers quoi elles tendent, pas de leur manière de le vivre ici et maintenant. Faire mon possible pour que ce vers quoi je tends s'incarne, à sa mesure, ici et maintenant.

Celui que je critique ou que je crains

Je gagne à imaginer que je suis celui que je critique ou que je crains, jusqu'au bout.


Toutes les nuances que je mets entre lui et moi m'éloignent de la vérité et de la liberté.