– Tu sais, je crois que j’ai compris ce qui se passait pour moi cette année avec Le livre sur les quais.
– Ah oui?
– Mais bon, c’est peut-être pas le meilleur moment pour faire de la psychologie métaphysique: on en recausera demain. Là, faudrait plutôt qu’on dorme, tu crois pas?
– C’est que t’as aiguisé ma curiosité…
– Alors, en deux mots: je me suis dit que Sylvie, qui est loin d’être une mauvaise personne mais qui commence à devenir pas mal stressante quand elle ventile, incarnait mon surmoi. On fonctionne plus ou moins de la même manière, mêmes exigences, même peur du regard de l’autre, mais elle me pousse plus loin que ce que je voudrais en m’appuyant sur les mécanismes de la hiérarchie. Du coup, comme c’est extérieur et que c’est exagéré, c’est plus facile à observer que quand c’est seulement dans ma tête, du genre de ce que je m’exigeais tous les jours pour mon écriture à Buenos Aires. Du coup, ça me donne deux trois pistes pour essayer de me prendre un peu moins le chou.
– ll me semble que tu vois assez juste.
– Parce que bon: aller aussi à fond dans toutes les directions, au bout de chaque détail, s’exiger autant... OK pour une œuvre d’art ou pour une démarche spirituelle, à la rigueur, mais pour un salon littéraire… En fait, je vois vraiment rien qui pourrait justifier un tel stress.